Tranches de quais
Spectacle à sketches
1 homme
(Un version existe aussi pour une distribution modulable, avec au moins
4 hommes et 5 femmes)
80 minutes
décor à transformations
Tranches de quais est conçu comme un One Man Show, mais les sketches peuvent être interprêtés par différents acteurs. Une version existe même avec la plupart des sketches récrits pour plusieurs personnages. Il est donc possible pour une compagnie de faire un travail collectif et bien intéressant à partir de ces textes...
Tranches de quais a été créé par Laurent Priou,
dans une mise en scène de Vincent Dubois (les Bodin's).
Production du Barroco Théâtre
Un aéroport, une gare, un quai... Dans la fourmilière des humains qui s'agitent en tous sens, le regard de l'humoriste traque les personnages et les tranches de vie. Il y a ceux qui sont revenus de tout, ceux qui sont partis de rien, ceux qui se perdent, ceux qui se retrouvent. Certains décollent, d'autres s'écrasent, beaucoup déraillent...
La grande machinerie des transports modernes donnent bien des rêves et bien des cauchemars aux petits hommes instables...
Extrait...
(L’homme, avec une petite sacoche en bandoulière et une valise à ses pieds, est au milieu de la scène, face au public. Il est jovial, il part en vacances sous les tropiques. Il attend, souriant et décontracté. Il glisse un petit mot à la personne imaginaire devant lui dans la file :) Ça va pas vite, hein ?… (Il se retourne pour évaluer la distance depuis le fond de la scène, puis regarde sa montre.) Trois mètres en vingt minutes… (Il calcule de tête…) On fait du neuf à l’heure ! En mètres…
(Il se retourne vers une personne qui vient sans doute d’arriver derrière lui.) Monsieur, je vous conseille plutôt la file d’à côté, ça avance beaucoup plus vite… Non, moi je reste dans celle-là. J’y ai pris mes habitudes !
(Il pousse un peu sa valise du pied et avance.) Ah, quarante centimètres !… Non, en fait, je reste là, parce que si je change de file, c’est là que ça se mettra à bloquer, et celle-ci se mettra à avancer. C’est comme ça. Où que j’aille, je suis toujours dans la file des cons ! (Il rigole brièvement, car il doit être le seul à trouver ça drôle.) J’ai le syndrome de la file qui n’avance pas. Au péage d’autoroute, j’hésite, gauche, droite, milieu, et je finis derrière celui qui passe une demi-heure à chercher sa petite monnaie. Au supermarché, devant moi y a toujours un code-barre qui passe pas ou des tomates pas pesées. Fatalité. Faut pas être pressé. (Il lance en boutade au monsieur qui est désormais dans la file d’à côté :) Le premier arrivé paye son coup ?! (Petit geste pour signifier que le monsieur peut déjà préparer sa monnaie.)
On dit que l’avion est un moyen de transport merveilleusement rapide. C’est sûr, Paris-Londres, y a pas le temps de détacher sa ceinture : à peine on a fini de décoller qu’il faut déjà se préparer à atterrir. Seulement, en faisant du 9 mètres à l’heure pour enregistrer les bagages, ça fait sacrément baisser la moyenne, hein ! (Il avance de 50 cm.) Et pour les récupérer, les bagages, sur le tapis, hein ? Il est pas supersonique, le tapis ! (Il avance encore un peu.) Dîtes donc, ça avance, là ! Jour de chance, c’est moi qui vais payer mon coup !… (Il prend sa valise à la main, prêt à faire le dernier mètre qui le sépare du comptoir.) J’ai jamais été aussi près ! (Il sort son billet de sa poche, le lève bien haut et fait le dernier pas, triomphant.) Gagné !
(Souriant, il tend le billet.) Bonjour. Good morning… (Le sourire se crispe. Problème.) Comment ça, terminé ?… Ne me dîtes pas que j’ai aussi le syndrome du guichet qui ferme !… Y a plus de place, y a plus de place, j’ai payé mon billet, j’ai forcément une place !… C’est ça, liste d’attente sur le prochain vol ! Ben voyons ! On me la fait pas, à moi. Ma femme aussi, avant qu’on se marie, elle a voulu me faire le coup du surbooking. Amoureuse de Bernard, elle sortait avec Jean-Luc en ayant promis à Gilbert. J’avais le ticket, mais zou, liste d’attente sur sa copine Sylvie ! Alors là je vous prie de croire que j’ai déboîté de la file des cons et je suis passé devant tout le monde ! Première classe, champagne et voyage de noce !… Vous vous en fichez, peut-être, mais là ça va faire pareil !… Non, je ne vous demande pas de m’épouser. Une place dans l’avion, que je veux (il secoue son billet sous le nez de l’hôtesse), et je vous fais grâce du champagne…
C’est plein, c’est plein, bien sûr c’est vite plein si vous vendez 300 billets pour 200 places ! Mais c’est pas Pôle Emploi ici, où ils convoquent 50 personnes quand il y a 10 boulots ! Je sais ce que c’est, on ne me la fait pas, à moi ! On poireaute la matinée avec son petit ticket 43, et quand c’est son tour, si on ne le loupe pas en s’étant endormi, on s’entend dire « terminé, les boulots sont pris ». Qu’est-ce qu’il avait de plus, le numéro 8, à part la chance de trouver plus vite où était planqué le distributeur de tickets ? Ni une ni deux, tempête là dedans, eh bien je l’ai eu mon boulot !… Vous vous en fichez, peut-être, mais là…
Une place ! Une ! Vous n’allez pas me dire que vous êtes à une place près ! Y a bien un strapontin quelque part dans cet avion !…
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