L'effet salaire
Spectacle à sketches
1 homme, 1 femme
(adaptable pour une distribution variable)
80 minutes
décor libre
L'effet salaire est prévu pour un homme et une femme. Il peut donc intéresser des jeunes compagnies professionnelles désireuses de monter un spectacle très drôle, avec beaucoup de personnages différents pour chaque comédien. Mais il est aussi possible de l'adapter pour des troupes amateurs souhaitant faire jouer plus d'acteurs. Et les sketches de L'effet salaire fournissent une matière formidablement riche pour les ateliers théâtre adultes.
Les comédiens ne sont pas des stars, l’auteur n’est pas célèbre, et ils ont l’ambition d’associer le rire et l’intelligence. C’est dire qu’ils ont toutes les raisons de passer inaperçus ! Pourtant il reste une solution pour conquérir les foules : choisir un sujet bien racoleur... Le cul est incontestablement le plus efficace. Pour aller au bout de la provocation, le spectacle aurait pu s’appeler « Les monologues du trou de balle », mais les artistes ne peuvent se renier à ce point. Le défi est pourtant lancé : rester fin, drôle, étonnant, caustique, sur un thème au fort risque de dérapage. « L’effet salaire » est une belle fleur insolite, poussant sur le fumier de la communication moderne. Son parfum est un gaz hilarant, et en plus, on est fier de ce rire là !
Extrait...
Les dix-huit trous
Lui est très sérieux, Elle est assez snob. Ils sont au bar du club-house, un cocktail à la main.
Elle – Au club, nous sommes dix-huit. Dix-huit trous de balle. Moi je suis le trou numéro douze.
Lui – Et moi le trou numéro dix-huit. Le dernier. Mais souvent le plus important. Celui qui fait la décision.
Elle – Je dois dire que notre vie de trou de balle est assez agréable. Nous avons bien conscience d'être privilégiés. Nous sommes des trous de première catégorie.
Lui – Nous menons une vie saine, au grand air, dans le calme, entre gens de bonne compagnie.
Elle – Et nous sommes bichonnés ! Tous les jours inspectés par des mains expertes...
Lui – Car nous devons être impeccables !
Elle – Autour de nous, dès qu'il y a quelques poils qui dépassent, la tondeuse arrive, et hop ils nous rasent la touffe !
Lui – Cela frise la maniaquerie, même ! A la limite, j'avoue que de temps en temps j'aimerais bien un brin de fantaisie, voir une fleur pousser dans le voisinage, côtoyer une ou deux crottes de mouton pourquoi pas, mais non, il faut toujours être propre au centre d'un rond vert irréprochable !
Elle – Au moins nous avons le plaisir d'être l'objet de toutes les convoitises. Tous ces regards fixés sur nous, avec une seule idée, une seule obsession : y entrer le plus rapidement possible.
Lui – Moi, les meilleurs y arrivent en quatre coups.
Elle – Moi, en trois. La voie est plus ouverte.
Lui – Mais certains mettent quinze ou vingt coups. Ils approchent, bien, et lorsqu'ils sont tout près, au moment de conclure, lorsqu'ils n'ont plus qu'un ou deux puts faciles, on dirait qu'ils font exprès de passer à côté ! Ils tournent autour du pot, si je puis dire. Ils puttent un coup, deux coups, trois coups, ça passe à gauche, à droite, devant, derrière...
Elle – C'est vrai que c'est agaçant, ceux qui puttent de travers.
Lui – Mais enfin, quel bonheur quand la balle finit par entrer !
Elle – La balle, oui. Mais moi, ce que je n'aime pas, c'est qu'on me plante le drapeau. Ah, je me trouve cloche avec mon piquet, mon petit fanion numéro douze, là, planté dedans !
Lui – Non, moi je ne déteste pas... Par contre, ce qui me gêne, c'est parfois d'être observé sous toutes les coutures. Il y a des gens, quand ils arrivent devant le trou de balle, ils regardent comme ci, comme ça (Il imite le golfeur méticuleux qui étudie le terrain dans toutes les positions avant d'ajuster son dernier coup), vue d'ensemble, vue de détail, et que j'examine, que je réfléchisse, que j'étudie la pente, le sens du vent, le taux d'humidité, que sais-je !
Elle – C'est parce que tu es le dernier. C'est normal, le dernier coup dans le dernier trou, ils font durer le plaisir !
Lui – Enfin, chez nous au moins, on ne s'ennuie pas !
Elle – C'est vrai. Il y a bien parfois quelques moments de creux, mais après tout, quel trou n'a pas de creux, hein ?
Lui – Ah, chère douze, quel humour ! Je vous adore.
Elle – Moi aussi je vous aime. Profondément ! (Il glousse.) Nous sommes une petite famille, ici, nous avons tous le même parcours...
Lui – Nous sommes tous des enfants de la balle ! (Ils gloussent tous les deux.)
Elle – Arrivés au sommet dans la hiérarchie des trous. Nous avons réussi à percer ! (Ils rient.)
Lui – Nous sommes comblés ! Et pour un trou, être comblé, c'est un comble ! (Ils s'esclaffent.)
Elle – Ah, nous rions, nous rions, mais…
Lui - Et nous buvons, nous buvons… comme des trous !
Elle - Ah ! Mais… ayons tout de même une pensée pour tous les petits trous de balle qui n'ont pas notre chance.
Lui – Et qui ne l'auront sans doute jamais, car aujourd'hui notre métier de trou... est bien bouché. (Il pouffe.)
.../...